Origines et relations avec le sport
Dans l’univers du water-polo canadien, un nom se démarque du reste : Waneek Horn-Miller. C’est une femme fière et forte du clan de l’Ours de la nation mohawk de Kahnawake, à proximité de Montréal. La culture et l’histoire des Mohawks sont riches et dynamiques et se fondent sur l’honneur, la confiance, la paix, le respect et le leadership.

Waneek Horn-Miller a été élevée en compagnie de ses trois sœurs dans une famille monoparentale par sa mère, Kahn-Tineta Horn. Elle se souvient que pendant son enfance, il n’y avait parfois pas de chauffage dans la maison ou pas grand-chose à manger, mais que les carences matérielles étaient largement comblées par l’amour et l’appui inconditionnel les incitant à poursuivre leurs rêves. Enfant, elle rêvait de participer un jour aux Jeux olympiques. Sa mère a déménagé toute la famille à Ottawa pour permettre à ses filles d’avoir accès à de meilleures opportunités. Elles partageaient une petite chambre meublée d’un sofa-lit où elles dormaient toutes ensemble, en face du YMCA. Avec les quelques économies qu’elle avait pu amasser, elle a acheté à ses filles un abonnement au YMCA, permettant ainsi à Waneek de s’impliquer plus sérieusement dans les sports. Elle insistait souvent sur le fait que la vie ne nous donne pas beaucoup de chances, mais quand cela arrive, il faut saisir l’occasion et faire de notre mieux pour qu’elle porte fruit.

Bois d’orignal sculpté représentant Waneek Horn-Miller en compétition en water-polo aux Jeux olympiques de 2000 à Sydney, en Australie.
Gracieuseté de Waneek Horn-Miller
Pendant les premières années de son parcours sportif, Waneek Horn-Miller a remarqué à quel point il était rare de rencontrer d’autres athlètes autochtones. Partout où elle allait, elle se heurtait à des propos faisant preuve de racisme systémique. Elle était encore très jeune, mais elle se souvient à quel point « c’était un message si difficile et décourageant à entendre pour une petite fille de dix ans ». Quand elle a demandé à sa mère « Est-ce que c’est vrai ce qu’ils disent? », celle-ci a répondu : « Saute dans la piscine et montre-leur! », ce que Waneek Horn-Miller s’empressa de faire en gagnant trois championnats provinciaux de natation de suite en Ontario, à compter de l’âge de 11 ans.

CP2863485, la Presse canadienne/Kevin Frayer
À l’âge de 14 ans, Waneek Horn-Miller a vécu un défi beaucoup plus difficile que celui d’être adolescente ou de s’entraîner à la piscine. La vie l’a placée aux premières lignes d’un moment historique, celui du conflit connu sous le nom de crise d’Oka.

CP116262552, LA PRESSE CANADIENNE/ Ryan Remiorz
Non loin de la ville d’Oka, au Québec, les Mohawks avaient installé des barricades pour bloquer l’expansion d’un terrain de golf qui empièterait sur les terres sacrées et non encore cédées d’un cimetière ancestral de la communauté mohawk. Le conflit dura 78 jours et attira l’attention de la communauté internationale. Lorsque des actes de violence ont éclaté entre les soldats canadiens et les militants mohawks au dernier jour de l’affrontement, Waneek Horn-Miller a été blessée près du cœur par la baïonnette d’un soldat alors qu’elle transportait sa sœur cadette dans ses bras. Cette expérience traumatique d’avoir souffert cette blessure presque mortelle l’a forcée à interrompre momentanément son parcours athlétique, et elle a pensé abandonner le sport pour toujours. Grâce à l’appui et aux encouragements de sa mère, un an après avoir été blessée à Oka, elle s’est jointe à un groupe de coureurs autochtones et non autochtones de partout au monde pour participer à la Course sacrée Canada 1991, un périple commençant à Victoria, en Colombie-Britannique, et se terminant à Kahnawake, au Québec. Dans le cadre des courses sacrées, les coureurs se relaient d’une communauté et nation autochtone à l’autre afin de raviver un sentiment de force et d’unité. En 1992, elle a participé à la Course sacrée de l’Amérique du Nord, qui partait de Fairbanks, en Alaska, et se terminait à Santa Fe, au Nouveau-Mexique.
C’est Alwyn Morris, athlète olympique en canoë-kayak de vitesse, qui a encouragé Waneek Horn-Miller à reprendre l’entraînement du water-polo. Elle a été sélectionnée comme membre des équipes canadiennes d’étoiles féminines de water-polo junior et sénior de 1991 à 1999. Suivant l’exemple de ses ancêtres mohawks, elle a surmonté un événement terrifiant, tragique et polarisant de sa vie personnelle et de l’histoire du pays pour ensuite créer quelque chose de beaucoup plus positif.

Gracieuseté de Waneek Horn-Miller
Dix ans plus tard, presque jour pour jour, Waneek Horn-Miller faisait son entrée aux Jeux olympiques de 2000 à Sydney, en Australie, en tant que co-capitaine de l’équipe féminine de water-polo du Canada, alors que le sport était ajouté au programme olympique pour la première fois. Elle est ainsi devenue la première femme mohawk de l’histoire canadienne à participer à des Jeux olympiques. Ce faisant, elle a réussi à réaliser son rêve d’enfance, mais elle a aussi saisi l’occasion de rendre honneur à la mémoire de ses ancêtres en montrant au monde entier à quel point les femmes autochtones sont fortes, tenaces et habiles. Sa résilience et sa façon de répondre aux défis et aux situations de crise sont une source d’inspiration nous incitant à retirer quelque chose de positif même des circonstances les plus difficiles, et à devenir le meilleur de nous-même.

Gracieuseté du Panthéon des sports canadiens